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La prière, partie 4

Dieu est grand
La grandeur de Dieu se manifeste aussi dans certaines expériences religieuses.
TOUT existe par Dieu . L’hymne à la création en est un exemple concret. C’est par sa Parole que tout fut créé. Personne n’aide Dieu dans son œuvre, ni la matière, ni le plan ne lui sont donnés. Cette grandeur divine est libre. Elle est sans effort . Dieu dit : Que cela soit et cela est. La véritable grandeur de Dieu se trouve dans la doctrine de la Divine Providence. Notre être et nos forces sont limitées. Dieu lui peut tout. Il peut créer et de la manière la plus parfaite et nous le donner. Il faut rajouter qu’un être est d’autant plus grand que sa nature et ses sentiments sont nobles. Dieu n’est pas seulement toute réalité, il est aussi toute bonté. Justice, pureté, ordre sont des manières de parler de Lui. Dieu est lumière et il n’y a pas de ténèbres en Lui. Cette grandeur est toute chaleur et tendresse, tout amour. Dieu est grandeur parfaite.

L’adoration
Devant cette grandeur, l’homme ne peut que s’incliner. Pas seulement parce qu’il est conscient de sa petitesse mais il s’incline dans la prière, pieusement. Et cela d’une manière totale et définitive, en tant que créature devant son créateur. C’est l’adoration. L’adoration est l’expérience vivante du fait que Dieu est grand et que l’homme est petit, que Dieu subsiste par Lui et en Lui-même tandis que l’homme n’existe que par Dieu. L’adoration c’est dire : Vous êtes Dieu, je suis homme. Vous êtes le maître de vous-même et vous vous suffisez à vous-même dans la béatitude. Au contraire le sens de mon existence vient de vous, je vis de Votre lumière et sens en Vous les dimensions de mon existence.
Il faut noter une chose, dans l’adoration, l’homme qui prie ne se courbe pas seulement devant Dieu parce que celui-ci est plus grand que l’homme (ce serait uniquement de la soumission). Il le fait parce que c’est une chose vraie et véritable en elle-même. Si on ne s’inclinait que par force, ce ne serait pas digne de Dieu ni de nous. L’adoration, c’est dire : Je m’incline parce que Vous en êtes digne. Je reconnais que Vous êtes réalité et vérité, puissance et bonté, force et valeur infinie. Vous êtes celui qui donne sens à toute chose.
L’adoration n’est pas seulement de la plus haute importance dans la vie religieuse de l’homme mais elle est de la plus haute importance dans la vie spirituelle.
Il faut pratiquer l’adoration. Nous confondons souvent prière et demande. Mais comme le dit le Seigneur dans le sermon sur la montagne : Votre Père sait ce dont vous avez besoin avant que vous ne l’ayez demandé. Nous oublions trop souvent que l’adoration est toute aussi importante peut être même plus importante que la demande. Il nous faut donc la pratiquer, nous recueillir, nous mettre en présence de la grandeur de Dieu et devant cette grandeur, nous incliner avec respect et dans la liberté de notre cœur.


La louange
La grandeur de Dieu trouve avant tout son expression dans les noms de Créateur et de Seigneur. Il est l’incréé qui a tout créé. Celui qui n’a pas de commencement et qui tient son existence de Lui-même. Il est l’infini, l’immortel, l’éternel. La grandeur de Dieu suscite encore un autre mouvement de la prière lorsque la beauté apparaît dans sa grandeur. Cette grandeur n’a pas seulement le caractère de la majesté mais aussi celui de la splendeur qui est le signe du rayonnement de la vie divine. Devant cette splendeur, le sérieux de l’adoration se change en joie de louange. A chaque page de la Bible, nous trouvons des mots qui chantent la louange de Dieu, des cantiques, des hymnes. On parle de la sainteté de Dieu, de sa grandeur,
de sa puissance, de sa sagesse, de son éternité, de sa justice, de sa bonté, de sa patience. On fait ainsi entendre à Dieu combien il compte pour nous, combien on est sûrs de pouvoir compter sur Lui, combien nous sommes sûrs de son amitié. La prière de louange apparaît partout dans la révélation. Beaucoup de psaumes sont inspirés de cette expérience profonde de la splendeur de Dieu et célèbrent l’une après l’autre ses vertus éternelles et ses œuvres. La louange de Dieu jaillit de partout chez les prophètes. De même, dans les Evangiles, nous trouvons les chants de louange de Marie et de Zacharie. Chez Saint François d’Assise, on trouve le cantique des créatures. Elles sont invitées à louer Dieu.

Très haut tout-puissant, bon Seigneur,
à toi sont les louanges, la gloire et l’honneur, et toute bénédiction.
À toi seul, Très-haut, ils conviennent
Et nul homme n’est digne de te mentionner.
Loué sois-tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures,
spécialement, monsieur frère Soleil,
lequel est le jour, et par lui tu nous illumines.
et il est beau et rayonnant avec grande splendeur,
de toi, Très-Haut, il porte la signification.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur Lune et les étoiles,
dans le ciel tu les as formées, claires, précieuses et belles.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par frère Vent,
et par l’air et le nuage et le ciel serein et tout temps,
par lesquels à tes créatures tu donnes soutien.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur Eau,
laquelle est très utile et humble, et précieuse et chaste.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par frère feu
par lequel tu illumines dans la nuit,
et il est beau et joyeux et robuste et fort.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur notre mère Terre,
laquelle nous soutient et nous gouverne,
et produit divers fruits avec les fleurs colorées et l’herbe.
Loué sois-tu, mon Seigneur,
par ceux qui pardonnent pour ton amour
et supportent maladies et tribulations.
Heureux ceux qui les supporteront en paix,
car par toi, Très-Haut, ils seront couronnés.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur notre mort corporelle,
à laquelle nul homme vivant ne peut échapper.
Malheur à ceux qui mourront dans les péchés mortels.
heureux ceux qu’elle trouvera dans tes très saintes volontés,
car la seconde mort ne leur fera pas mal.
Louez et bénissez mon Seigneur,
et rendez-lui grâce et servez-le avec grande humilité.



Il n’est pas question de prêter au soleil, à la mer, aux arbres, une voix pour louer Dieu. Mais ils sont dans leur être un miroir où se reflète la splendeur de Dieu, parce qu’Il les a créés et qu’Il a mis sur eux un reflet de sa nature.
La prière de louange est d’autant plus pure qu’elle jaillit d’une expérience plus profonde de la gloire de Dieu, d’une joie plus authentique. Louer Dieu consiste à s’élever jusqu’au niveau où existe ce dont l’homme vit en réalité. Toute la journée est transformée si dès le matin, on dit par exemple le psaume 148.
Certes, nous devons demander et porter devant Dieu les besoins de notre vie pleine de misères mais peut-être serions-nous encore mieux fortifiés si nous consentions à ne plus porter nos regards sur nous-mêmes mais sur Dieu. Nos intérêts n’y perdraient rien car le Père qui est dans le ciel sait ce dont nous avons besoin avant même que nous ne lui ayons demandé.


La prière, partie 3

Le plus souvent, la prière doit être soutenue par la volonté et l’exercice. La grande difficulté rencontrée est dans le fait que la réalité de Dieu n’est pas toujours ressentie. Celui qui prie se sent alors dans le vide. Aussi est-il important de persévérer. La persévérance aux heures de vide a un sens tout particulier qu’aucune autre prière spontanée faite plus tard ne peut atteindre. Car la persévérance montre que l’on prend la foi au sérieux. C’est s’appliquer à la prière uniquement et entièrement pour Dieu. Le vide que l’on peut à priori ressentir est plein d’une présence légère que l’on trouve quand on prie. Car Dieu est toujours présent. Simplement, nous sommes sur cette terre, dans l’obscurité et c’est cela qu’il est parfois dur de percer.

Dieu est Saint
Parmi toutes les vérités que contient la révélation, la première d’entre elle est que Dieu est Saint. C’est le caractère fondamental de Dieu, son essence. La Sainteté de Dieu est le caractère premier et essentiel qui le fait être Lui-même, différent de tout ce dont nous pouvons avoir l’expérience, signe distinctif auquel Il peut être reconnu. Les objets religieux peuvent nous mener à pressentir cela. Si on prend l’exemple d’une église, on peut voir certes qu’elle est belle, mais quand on entre dedans, on a le sentiment de l’ « autre » chose, de ce qui fait qu’on se tait et qu’on se met à genoux et qu’on laisse dehors tout ce qui nous reliait à la terre. Ce sont là des indications sur la sainteté de Dieu, sur ce caractère qui lui appartient à Lui seul, qui est irremplaçable et si précieux, et duquel dépend ce qui est le plus important pour nous : le salut. La sainteté signifie que Dieu est pur, d’une pureté toute puissante, ardente, qui ne souffre de pas la moindre tâche. Elle signifie qu'Il est bon, non seulement parce qu’Il obéit aux exigences du bien, mais parce qu’Il est le Bien, et dans ce sens, personne n’est si bon que Dieu seul. Dieu est la mesure à laquelle tout doit être référé. Dès que l’homme approche de Dieu, il entre en contact avec la sainteté. Il prend conscience que lui-même n’est pas saint, qu’il est du monde, de la terre, qu’il est souillé et coupable. Il ressent alors deux sentiments ambivalents. Le premier lui fait ressentir le besoin de s’éloigner de Lui car il se sent pécheur. En même temps, il ressent qu’il a besoin de Lui, ce Dieu saint et que c’est une question de vie ou de mort. De ces deux mouvements naissent des formes différentes de prière. C’est en définitive sur eux que repose toute prière car c’est la réponse de l’homme à la sainteté de Dieu. La prière répond en tant qu’acte de l’homme à la sainteté comme attribut de Dieu. L’homme se sent parfois agacé par la sainteté de Dieu et se révolte. Le péché est en fait la résistance à la sainteté de Dieu. Ce n’est pas le propre de certains rebelles, non cela existe en tout homme. Si cet aspect triomphe alors c’est la mort de la prière.
Quand l’homme prend conscience de son manque de valeur propre, et s’aperçoit qu’il est injuste, mauvais et égoïste, il se rend compte que le péché est la négation de la sainteté. Il le voit et il l’avoue. Plusieurs choses peuvent permettre à l’homme de se dérober à cet aveu. La première est le refus de voir son péché. C’est une illusion où se cache de l’orgueil. Certes il ne faut pas se laisser écraser par le sentiment d’être pécheur, mais il faut que ce soit une occasion pour nous de nous rénover en profondeur.
La deuxième façon consiste à voir son péché et à refuser de se trouver devant Dieu. Ici, on a besoin de l’humilité. Il suffit d’être honnête et d’accepter sa responsabilité.
La troisième façon est le découragement. On a l’impression de toujours retomber dans le même péché, de refaire tout le temps les mêmes erreurs. Or Dieu n’est pas seulement l’auteur du Bien et le gardien de la justice, Il est aussi la puissance insondable du recommencement. Dieu, sainteté parfaite, veut et peut nous pardonner. Le pardon de Dieu est créateur et Il fait que celui qui était pécheur ne l’est plus. Dieu le fait entrer dans sa sainteté, la lui fait partager et Il le place à un nouveau commencement de ses efforts et de sa lutte.
La conscience de ne pas pouvoir vivre sans Dieu. C’est le deuxième aspect qui naît de la sainteté de Dieu. Si la conscience du péché se transforme en révolte ou en découragement, alors nous nous coupons de Dieu. Si elle se vit dans l’humilité et la vérité, elle nous rapproche de Dieu car cela nous permet de dire : Vers qui irions-nous ? L’homme sait que Dieu est tout par excellence : intelligence, salut, vie etc. S’il ne ressent pas spontanément le désir de Dieu parce qu’il est sans courage et sans ardeur, il doit se dire qu’il devrait l’éprouver et y tendre de toute sa foi. La faim et la soif de Dieu sont essentielles à l’homme. Si on ne les éprouve pas, cela ne veut pas dire qu’on n’a pas besoin de Dieu, mais au contraire qu’on est malade et qu’on a besoin de guérir. C’est une forme de prière qui consiste à faire un effort pour aller vers Lui. L’âme humaine est capable de Dieu disait St Augustin. On en trouve son expression dans la prière d’effort , de désir, de participation et d’unification. Pour cela il faut que le mouvement vienne de la liberté de l’homme et du fond de lui-même. Alors la prière devient amour. L’amour est d’avoir à soi un être vivant et personnel. C’est le mystère de l’amour divin : Dieu est celui qui comble l’amour le plus profond, Il est celui qui le suscite. Nous devons lui demander de nous donner le désir de son amour et de le réaliser.

Reculer devant Dieu dans la conscience du péché, tendre vers Lui dans le désir de la communion est contenu dans toute prière qui mérite ce nom. Quand cela se produit l’homme sait qu’il n’est pas saint mais il sait aussi que Dieu est son salut et qu’il doit tendre vers Lui